22 Août 2006
La terrible guerre connait une trêve fragile... Impuissants, nous venons d’assister à la destruction systématique des ponts de tout un pays...
On s’attaque à ce qui relie, on détruit ce qui réunit, on abat ce qui permet de franchir le pas.
Les peuples sont condamnés au recroquevillement et à l’amertume.
Les précipices ont gagné, les ponts sont coupés.
"Partout dans le monde, en tous lieux où ma pensée se meut ou s’arrête, je les retrouve ces ponts fidèles et taciturnes, symbolisant le désir éternel et insatiable qui pousse l’homme à relier, réconcilier, unir tout ce qui surgit devant son esprit, son regard et ses pas, afin qu’il n’y ait pas de division, d’antagonisme, de séparation.
Il en est de même quand je me laisse aller au rêve ou au jeu fantasque de mon imagination.
Un jour, alors que j’écoutais un air de musique d’une beauté inouïe mais emplie d’amertume, j’ai vu soudain un pont coupé en son milieu.
Les deux parties de l’arc brisé tendaient douloureusement l’une vers l’autre, dans un effort désespéré pour lui restituer son intégrité disparue.
La beauté, dans sa ténacité, sa noblesse, son implacabilité, ne sauraient se voir remplacée que par une chose : l’inexistence.
Je dirai enfin que tout ce qui exprime la vie – les pensées, les aspirations, les regards, les sourires, les paroles, les soupirs – tend vers l’autre rive, qui est son but, ce qui lui donne son vrai sens.
Il y a toujours quelque chose à maîtriser, surmonter : le désordre, la mort, l’absurde.
Tout est passage, pont dont les extrémités se perdent dans l’infini, à côté duquel ceux de ce bas monde ne sont que jouets puérils, pâles symboles. Nos espoirs se situent toujours de l’autre côté."
Ivo Andric, Ecrivain, prix Nobel de littérature
C'est ainsi que durant les 34 jours de guerre...pendant que l'on s'acharnait à détruire les ponts...des centaines de gens...reconstruisaient pierre après pierre..des ponts indestructibles entre les gens...
Une rencontre qui unissait des personnes très différentes..des personnes qui dans d'autres circonstances..ne se seraient peut être jamais rencontrées...
Du nord au Sud...
Au delà des conditions sociales et culturelles...
Des maisons s'ouvraient pour accueillir ceux qui avaient tout perdu...
Le pain se partageait même si on avait toujours faim...
Chrétiens et musulmans toutes confessions confondues, priaient ensemble pour la paix...
Des gens donnaient leur vie, pour sauver un frère inconnu..
Les gens se redécouvraient frères...amis...parents...
Les ponts se reconstruisent...
Car l'espoir de la paix...est toujours dans l'unité..
Je vous embrasse tous !